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dimanche, 05 août 2018

Le dernier des Manouchian

En 2006, nous en parlions ici-même. Demeuraient alors deux survivants du groupe Manouchian, exterminé durant la Seconde guerre mondiale, et célébré par le chant sublime d’Aragon. Le dernier d’entre eux, Arsène Tchakarian, vient de disparaître à l’âge de cent-un ans.

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Photo Joël Saget

20:28 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 28 février 2007

Ne pas y croire

Dans les lettres que Simone de Beauvoir envoie à Jacques-Laurent Bost qui effectue alors son service militaire à Amiens, je lis, en 1939, cette farouche volonté de ne pas croire à la guerre prochaine. Mieux : une volonté d’affirmer qu’elle n’aura pas lieu. On sent, dans son propos comme dans ce qu’elle rapporte de la vie à Paris à ce moment-là, que chacun, espérant évidemment la paix, se prend à créer de toutes pièces des raisons de nier le conflit qui menace. Des raisons politiques, économiques, tout ce qu’on voudra. On est prêt à inventer des raisons et à s’autosuggestionner tant on refuse l’idée de guerre. Naturellement, je ne me moque absolument pas d’une telle attitude, combien compréhensible. Et puis, il est si facile lorsqu’on connaît la suite de l’histoire, d’ironiser tranquillement en dactylographiant une note. Ce n’est certes pas mon but.

Je veux simplement dire ce dont je viens de prendre conscience, au lu de ces lettres d’amour. Ce qui est frappant, c’est le raisonnement totalement erroné.

Le lundi 28 août 1939, Simone de Beauvoir écrit : « Paris est assez mort, restaurants, boutiques fermés, mais ça sent les vacances beaucoup plus que la guerre. Les cafés, les cinémas sont pleins et les gens ont des visages souriants. Je crois que personne ne croit à la guerre ; Sartre n’y croit pas non plus. Naturellement, on est un peu impatients et nerveux aujourd’hui à attendre la réponse d’Hitler, mais dans l’ensemble il n’est pas dans une situation à engager une guerre. Le Japon a fait volte-face, l’Italie le lâche, l’Espagne a annoncé sa neutralité, l’Amérique est décidée à nous aider et surtout, on ne commence pas une guerre avec une carte de pain ; il ne semble pas que l’opinion publique en Allemagne soit des plus satisafaisantes pour Hitler. Maintenant, comme disait tout à l’heure un type au café de Flore, il faut toujours compter avec la connerie. Ce qu’on peut dire, c’est que l’Allemagne est bien mal partie pour une guerre et que si ça éclatait elle n’aurait pas bonne mine et sans doute ça ne durerait pas longtemps. En revanche, si ça n’éclate pas, c’est un dégonflage allemand et vraisemblablement on peut compter sur des années de paix après ça ». Elle ajoute un peu plus loin : « À Paris chacun pense ainsi et le ton est nettement à l’optimisme ».

Deux jours plus tard, le mercredi 30 août, elle note : « Nous continuons à être pleins d’espoir car malgré tout, des négociations sont engagées, le Parlement anglais n’a pas été rappelé plus tôt ; et il semble de moins en moins possible qu’Hitler puisse vouloir une guerre, il n’aurait pas bonne mine. Tous les journaux sont à l’optimisme et à Paris tous les gens aussi. Naturellement l’attente n’en est pas moins énervante ; on passe de drôles de journées, rythmées par les éditions des journaux ».

Simone de Beauvoir et Jacques-Laurent Bost, Correspondance croisée, 1937-1940, Gallimard, 2004.

14:50 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (4)

dimanche, 28 mai 2006

Pweege arwarr ler p’tee day-shuon-ay ?

Les éditions Les Quatre chemins, que je ne connaissais pas, ont eu la bonne idée de faire traduire un petit ouvrage, un opuscule, publié l’an dernier par la Bodleian library de l’université d’Oxford. Il s’agit des instructions distribuées aux soldats britanniques lors du débarquement de juin 1944. L’ouvrage a paru sous le titre Quand vous serez en France, quand le titre original était tout simplement Instructions for british servicemen in France. L’auteur est identifié comme The political warfare executive et l’éditeur comme The Foreign office, London. Concrètement, le rédacteur fut Herbert David Ziman, des services de renseignement de la section française du ministère de la Guerre.

 

On est étonné de l’empathie pour la France que présente ce texte, véritable guide de savoir-vivre totalement indépendant des opérations militaires, augmenté d’un précis d’histoire française, de quelques éléments de géographie et, en fin de volume, d’un lexique hilarant (dont le titre de cette note donne un exemple.) On voit que l’auteur est un francophile distingué. Certaines vues, qui ne sont jamais des jugements, frappent par leur exactitude et, de litote en litote, on s’amuse à lire entre les lignes la discrète comparaison qui est faite avec l’Angleterre, quant au mode de vie notamment. La version anglaise de ce manuel est intégralement reproduite à la suite de sa traduction.

 

On se demande bien pourquoi ce document, ourlé d’exactitude et de sympathie précise, a dû être préfacé par l’inénarrable et omniprésent Assouline, dont il n’est pas exactement prouvé qu’il possède quelque compétence pour introduire un tel sujet. Dans son abominable préface anecdotique et sans intérêt historique, il s’applique à accumuler, comme il nous y a habitués, fautes de langue et d’expression, en omettant de corriger les coquilles qui sont, dans son topo représentant un sixième du texte français, plus nombreuses que dans tout le volume. Quand diable cet imposteur cessera-t-il de faire autorité dans le monde du livre ?

 

Quand vous serez en France, traduit de langlais par Alexis Champon, Les Quatre chemins, 2006 (édition bilingue, 128 pages, 9, 90 euros.)

18:45 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (38)

samedi, 04 février 2006

L'Affiche rouge... plus deux

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Était-ce l’influence du poème d’Aragon, ultra-connu sous le nom de L’Affiche rouge ? Je pensais que tous les membres du groupe Manouchian avaient cessé de vivre, un jour, « quand les fusils fleurirent ». Vingt-trois condamnés.

Ils étaient vingt-cinq. Il y a deux survivants et l’un d’eux, Arsène Tchakarian, quatre-vingt neuf ans, est venu parler aux élèves d’une classe de troisième, au collège Chérioux à Vitry-sur-Seine. Cette rencontre s’est faite à l’initiative du professeur d’histoire, Géraldine Nari. Tchakarian a témoigné mais l’article du journal du Conseil général, Connaissance du Val-de-Marne, est très elliptique. Il ne parle pas, non plus, de l’autre survivant.

19:35 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (3)

mercredi, 14 décembre 2005

L’histoire aujourd’hui

Voici le texte d’une pétition qui circule actuellement parmi les historiens. Qu’en pensez-vous ?

 

 

Émus par les interventions politiques de plus en plus fréquentes dans l’appréciation des événements du passé et par les procédures judiciaires touchant des historiens et des penseurs, nous tenons à rappeler les principes suivants :

 

L’histoire n’est pas une religion. L’historien n’accepte aucun dogme, ne respecte aucun interdit, ne connaît pas de tabous. Il peut être dérangeant.

 

L’histoire n’est pas la morale. L’historien n’a pas pour rôle d’exalter ou de condamner, il explique.

 

L’histoire n’est pas l’esclave de l’actualité. L’historien ne plaque pas sur le passé des schémas idéologiques contemporains et n’introduit pas dans les événements d’autrefois la sensibilité d’aujourd’hui.

 

L’histoire n’est pas la mémoire. L’historien, dans une démarche scientifique, recueille les souvenirs des hommes, les compare entre eux, les confronte aux documents, aux objets, aux traces, et établit les faits.

 

L’histoire tient compte de la mémoire, elle ne s’y réduit pas.

 

L’histoire n’est pas un objet juridique. Dans un État libre, il n’appartient ni au parlement ni à l’autorité judiciaire de définir la vérité historique. La politique de l’État, même animée des meilleures intentions, n’est pas la politique de l’histoire.

 

C’est en violation de ces principes que des articles de lois successives, notamment lois du 13 juillet 1990, du 29 janvier 2001, du 21 mai 2001, du 23 février 2005,­ ont restreint la liberté de l’historien, lui ont dit, sous peine de sanctions, ce qu’il doit chercher et ce qu’il doit trouver, lui ont prescrit des méthodes et posé des limites.

 

Nous demandons l’abrogation de ces dispositions législatives indignes d’un régime démocratique.

 

Jean-Pierre Azéma, Élisabeth Badinter, Jean-Jacques Becker, Françoise Chandernagor, Alain Decaux, Marc Ferro, Jacques Julliard, Jean Leclant, Pierre Milza, Pierre Nora, Mona Ozouf, Jean-Claude Perrot, Antoine Prost, René Rémond, Maurice Vaïsse, Jean-Pierre Vernant, Paul Veyne, Pierre Vidal-Naquet et Michel Winock.

 

Voici ce que précise Le Monde du 14 décembre 2005 : « Livrant une liste non exhaustive, ils [les signataires] visent la loi du 23 février 2005 (sur le "rôle positif" de la colonisation), mais aussi les lois du 13 juillet 1990 (dite loi Gayssot, réprimant la négation de crimes contre l’humanité), du 29 janvier 2001 (reconnaissance du génocide arménien) et du 21 mai 2001 (reconnaissance de l’esclavage et de la traite des Noirs comme crimes contre l’humanité). »

07:00 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (96)

jeudi, 08 décembre 2005

Leçon d’histoire

« Nous serons indépendants à l’époque où tous les journaux parlent de la liberté de la presse mais sont esclaves de leurs propriétaires, de la pub, d’un parti. Où il y a une crise des journaux : pub à la télé.

 

Nous ne connaîtrons pas cette crise. Nous n’aurons d’argent que celui qui viendra au départ d’une souscription populaire. Nous n’aurons de responsabilité qu’envers le peuple.

 

Cela veut dire : envers les ouvriers, les paysans, les intellectuels et la petite bourgeoisie commerçante.

 

C’est le peuple qui informera.

 

Comment l’entendons-nous ?

 

Le peuple fait l’histoire.

 

C’est auprès de ceux qui font l’histoire que nous nous informons. Nos journalistes jusqu’aux directeurs seront payés comme les OS avec quelques arrangements en cas de famille nombreuse : [illisible] en gros 1000. Ils iront sur les lieux (grèves, etc.), bistrots, etc. Ils n’interrogeront pas les chefs s’il y en a mais les grévistes.

 

Un journal démocrate. Ça veut dire que le peuple y est maître.

 

Pas comme les autres.

 

Il ne sera pas un journal politique (inféodé à un parti). Pas même à un groupe gauchiste. Il y aura des maos. Et il faut reconnaître que les maos l’ont inspiré. Mais il ne servira pas les maos : journalistes professionnels. Et puis Foucault, Gavi et moi : sans partis. D’autres. Les maos eux-mêmes demandent un renforcement des non-maos pour les luttes internes du journal.

 

Divergences.

 

Luttes qu’il ne cachera jamais.

 

Mettre en plein jour.

 

Pas d’investissements et de parts : l’argent vient du peuple. Souscriptions. Abonnements. Donc pas de capitalistes pour infléchir l’orientation du journal.

 

Pas de publicité. Journaux d’information vivent de la pub. Résultat : si un produit est nuisible, ne peuvent le dire. »

 

Pour aujourd’hui, un petite leçon d’histoire et de culture politique. À quoi se rapportent ces notes ? Qui en est l’auteur ? À quelle période furent-elles rédigées ?

14:20 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (15)