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jeudi, 08 décembre 2005

Leçon d’histoire

« Nous serons indépendants à l’époque où tous les journaux parlent de la liberté de la presse mais sont esclaves de leurs propriétaires, de la pub, d’un parti. Où il y a une crise des journaux : pub à la télé.

 

Nous ne connaîtrons pas cette crise. Nous n’aurons d’argent que celui qui viendra au départ d’une souscription populaire. Nous n’aurons de responsabilité qu’envers le peuple.

 

Cela veut dire : envers les ouvriers, les paysans, les intellectuels et la petite bourgeoisie commerçante.

 

C’est le peuple qui informera.

 

Comment l’entendons-nous ?

 

Le peuple fait l’histoire.

 

C’est auprès de ceux qui font l’histoire que nous nous informons. Nos journalistes jusqu’aux directeurs seront payés comme les OS avec quelques arrangements en cas de famille nombreuse : [illisible] en gros 1000. Ils iront sur les lieux (grèves, etc.), bistrots, etc. Ils n’interrogeront pas les chefs s’il y en a mais les grévistes.

 

Un journal démocrate. Ça veut dire que le peuple y est maître.

 

Pas comme les autres.

 

Il ne sera pas un journal politique (inféodé à un parti). Pas même à un groupe gauchiste. Il y aura des maos. Et il faut reconnaître que les maos l’ont inspiré. Mais il ne servira pas les maos : journalistes professionnels. Et puis Foucault, Gavi et moi : sans partis. D’autres. Les maos eux-mêmes demandent un renforcement des non-maos pour les luttes internes du journal.

 

Divergences.

 

Luttes qu’il ne cachera jamais.

 

Mettre en plein jour.

 

Pas d’investissements et de parts : l’argent vient du peuple. Souscriptions. Abonnements. Donc pas de capitalistes pour infléchir l’orientation du journal.

 

Pas de publicité. Journaux d’information vivent de la pub. Résultat : si un produit est nuisible, ne peuvent le dire. »

 

Pour aujourd’hui, un petite leçon d’histoire et de culture politique. À quoi se rapportent ces notes ? Qui en est l’auteur ? À quelle période furent-elles rédigées ?

14:20 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (15)

Commentaires

Libération formule Sartre-July ?
En tout cas, années 67-68-69.

Écrit par : Benoit | jeudi, 08 décembre 2005

Réponse partiellement exacte. La suite ?

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 08 décembre 2005

Sartre, lors du lancement de Libé en 1973. Il était la caution morale à la suite des saisies de journaux maoïstes comme la Cause du peuple et de l'arrestation des directeurs de publication.

Écrit par : Dominique | jeudi, 08 décembre 2005

Bravo.

Il s’agit de notes (deux feuillets extraits d’un manuscrit de cinq) prises par Sartre en 1973 pour présenter le journal Libération dont le premier numéro paraît le 22 mai 1973. Dès le mois de décembre, les difficultés financières de ce journal sans publicité et sans attaches contraignent la rédaction à faire appel aux lecteurs : « On doit 48 millions d’anciens francs. Vous avez donné 12, 095 millions d’anciens francs. Il reste 35, 904 millions d’anciens francs », titre la livraison du 17.

Sartre assurera la direction du quotidien jusqu’au 24 mai 1974. C’était hier matin. Les choses ont bien changé.

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 08 décembre 2005

Directeur en titre, pas en fait. Il ne fera que quelques visites au journal qui ressemblait d'abord à un soviet avant que July ne revienne de sa désastreuse expérience à Bruay-en-Artois où il a bafoué toutes les règles du journalisme et de la morale politique. Sartre était là comme la vitrine légale afin que les responsables ne soient pas emprisonnés (on ne fourre pas Voltaire dans un panier à salades, dixit Pompidou). Il y avait dans le Libé de l'époque des choses qui pourraient sembler bien surprenantes aujourd'hui comme les notes de la claviste ou les annonces de taulards (mais pas de cours de la bourse, pas de sport, pas de programmes télé ou de météo).

Écrit par : Dominique | jeudi, 08 décembre 2005

Eh oui, c'était un journal libre. On a vu ce que July en a fait. Bien sûr, Sartre servait de vitrine et de pare-feu en même temps.

Le fameux "On n'arrête pas Voltaire" n'est-il pas de De Gaulle lui-même ? Non pas au moment de Libération, bien sûr, puisqu'il était mort, mais plus tôt, en 1970, quand Sartre vendait La Cause du peuple, interdit, dans la rue ? Il avait été ramassé par la police et libéré dans l'heure. Je croyais que ça venait de là, mais non, puisqu'en 1970, de Gaulle était déjà parti. C'était donc bien Pompidou, mais quand, finalement ?

A moins que cela remonte à plus tôt encore : 1968 ? Ou même l'année d'avant, au moment du tribunal Russell ? Auquel cas, ce serait bien de Gaulle ? Ah, j'ai oublié !

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 09 décembre 2005

"A un de ses ministres qui lui conseillait de faire arrêter le Jean-Paul Sartre de « La cause du peuple », le général De Gaulle répondit : « On ne met pas Voltaire en prison. »

http://www.vialibre5.com/maximevivas.htm


"Le Général De Gaulle répondant à ces ministres qui proposaient de coffrer Sartre lors de la guerre d'Algérie et de la publication du manifeste des 121 :"On ne met pas Voltaire en prison"

http://perso.wanadoo.fr/mondalire/sartre%20vu.htm

Écrit par : Feuilly | vendredi, 09 décembre 2005

Pour ceux que cela intéresse, voici la liste des 121:

Arthur ADAMOV - Robert ANTELME - Georges AUCLAIR - Jean BABY - Hélène BALFET - Marc BARBUT - Robert BARRAT - Simone de BEAUVOIR - Jean-Louis BEDOUIN - Marc BEIGBEDER - Robert BENAYOUN - Maurice BLANCHOT - Roger BLIN - Arsène BONNAFOUS-MURAT - Geneviève BONNEFOI - Raymond BORDE - Jean-Louis BORY - Jacques-Laurent BOST - Pierre BOULEZ - Vincent BOUNOURE - André BRETON - Guy CABANEL - Georges CONDAMINAS - Alain CUNY - Dr Jean DALSACE - Jean CZARNECEI - Adrien DAX - Hubert DAMISCE - Bernard DORT - Jean DOUASSOT - Simone DREYFUS - Marguerite DURAS - Yves ELLEOUËT - Dominique ÉLUARD - Charles ESTIENNE - Louis-René des FORETS - Dr Théodore FRAENKEL - André FRENAUD - Jacques GERNET - Edouard GLISSANT - Anne GUÉRIN - Daniel GUÉRIN - Jacques HOWLETT - Edouard JAGUER - Pierre JAOUEN - Gérard JARLOT - Robert JAULIN - Alain JOUBERT - Henri KREA - Robert LAGARDE - Monique LANGE - Claude LANZMANN - Robert LAPOUJADE - Henri LEFEBVRE - Gérard LEGRAND - Michel LEIRIS - Paul LEVY - Jérôme LINDON - Eric LOSFELD - Robert LOUZON - Olivier de MAGNY - Florence MALRAUX - André MANDOUZE - Maud MANNONI - Jean MARTIN - Renée MARCEL-MARTINET - Jean-DanieI MARTINET - Andrée MARTY-CAPGRAS - Dionys MASCOLO - François MASPERO - André MASSON - Pierre de MASSOT - Jean-Jacques MAYOUX - Jehan MAYOUX - Théodore MONOD - Marie MOSCOVICI - Georges MOUNIN - Maurice NADEAU - Georges NAVEL - Claude OLLIER - Hélène PARMELIN - Marcel PÉJU - José PIERRE - André PIEYRE de MANDIARGUES - Edouard PIGNON - Bernard PINGAUD - Maurice PONS - J.-B. PONTALIS - Jean POUILLON - Denise RENE - Alain RESNAIS - Jean-François REVEL - Alain ROBBE-GRILLET - Christiane ROCHEFORT - Jacques-Francis ROLLAND - Alfred ROSMER - Gilbert ROUGET - Claude ROY - Marc SAINTSAENS - Nathalie SARRAUTE - Jean-Paul SARTRE - Renée SAUREL - Claude SAUTET - Jean SCHUSTER - Robert SCIPION - Lonis SEGUIN - Geneviève SERREAU - Simone SIGNORET - Jean-Claude SILBERMANN - Claude SIMON - SINÉ - René de SOLIER - D. de la SOUCHERE - Jean THIERCELIN - Dr René TZANCK - VERCORS - J.-P. VERNANT - Pierre VIDAL-NAQUET - J.-P. VIELFAURE - Claude VISEUX - YLIPE - René ZAZZO.

LE MONDE DIPLOMATIQUE | septembre 2000 | Page 28
http://www.monde-diplomatique.fr/2000/09/A/14199

Écrit par : Feuilly | vendredi, 09 décembre 2005

La phrase est constamment attribuée à de Gaulle, mais surtout sous cette forme « On n'emprisonne pas Voltaire ». Certains sites parlent de mai 68, ce qui est hautement improbable, la plupart évoquent bien le manifeste des 121.

Écrit par : Dominique | vendredi, 09 décembre 2005

Effectivement, en y réfléchissant, la période de la guerre d'Algérie semble la plus vraisemblable. D'où vient alors que tant de gens, moi le premier, pensent à l'affaire de La Cause du peuple, qui est chronologiquement impossible ?

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 09 décembre 2005

Sartre dans le fourgon de police.

Écrit par : Dominique | vendredi, 09 décembre 2005

La photo célèbre ? Sûrement. Mais c'était sous Pompidou, ça. Pourquoi assimile-t-on cette image et de Gaulle ? La confusion des souvenirs...

Vérification faite, l'Algérie est le plus vraisemblable. Dans L'Aurore du 2 décembre 1960, Sartre déclare en effet : "Je veux être inculpé dans l'affaire du Manifeste des 121", protestant ainsi contre la faveur qui lui est faite de n'être pas inquiété quand beaucoup l'étaient.

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 09 décembre 2005

Il n'y a pas eu de poursuites judiciaires et cela aurait difficile vu le nombre de personnes impliquées, mais des sanctions administratives contre les fonctionnaires (Laurent Schwartz éloigné de Polytechnique, Vidal-Naquet suspendu un an au mépris de l'autonomie de l'Université, Bory renvoyé de l'Éducation nationale). En fait, les seules représailles ont été faites sur les agents de l'État. On n'emprisonne pas Voltaire, mais on se sépare de ceux qui s'en réclament.

Écrit par : Dominique | vendredi, 09 décembre 2005

Belle formule.

Il y a eu des représailles du côté des éditeurs : Lindon, Losfeld, Maspéro furent inquiétés plus que de coutume, et subirent des perquisitions, des saisies -- si je ne m'abuse (fin 1960, j'avais huit ans).

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 09 décembre 2005

Puisque nous parlons de Sartre, je signale un téléfilm de Claude Goretta dont le tournage vient de s'achever et qui sera diffusé sur FR2 en 2006 : Sartre, l'âge des passions.

Anna Alvaro interprète Simone de Beauvoir et le rôle du philosophe est tenu par Denis Podalydès. Le film se situe entre 1958 et 1964. Il a été réalisé à Paris, Rome, Venise et La Havane. Les rues de la banlieue parisienne ont servi à reconstituer... Moscou. Deux épisodes de cent minutes chacun.

En 2006 encore, autre téléfilm sur FR3 signé Ilan Duran-Cohen, avec Lorant Deutsch et Anna Mouglalis, Les Amants du Flore (de 1924 à 1949) : quatre-vingt dix minutes.

(Source : Le Monde 2 du 10 décembre 2005).

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 09 décembre 2005

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