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mardi, 25 septembre 2007

La manche et le pilon

Lorsque j’étais petit, les mutilés de la guerre de 1914 étaient encore nombreux dans les rues. Je revois celui-ci, remontant la rue Franklin, avec sa jambe artificielle. Dans les années 50, qui plus est, les prothèses étaient horribles : il n’y avait pas encore de biomécanique, on leur entait un horrible pilon de bois avec un bout en caoutchouc. Je me rappelle aussi les manches vides des vestons, qui pendaient comme des suppliciés. Et les béquilles, pour ceux qui avaient encore des mains pour les empoigner. Cela m’avait beaucoup impressionné.

Je ne sais pas pourquoi, depuis quelques années maintenant – peut-être est-ce justement le nombre de mes années qui commence à devenir indécent – je prête beaucoup d’attention aux monuments aux morts. On sait que j’aime la campagne et, en zone rurale, c’est affreux, on les voit mieux. Parfois, la même stèle porte un nom en plusieurs exemplaires, jusqu’à quatre. S’agissait-il du père et des trois fils, ou de quatre frères, ou de cousins, ou bien de simples homonymes ? J’imagine les femmes apprenant la disparition d’un premier, d’un deuxième, d’un troisième, d’un quatrième de leurs proches, voire de leurs enfants.

J’ai pensé à toutes ces choses ce matin, au réveil, et j’ai imaginé cette note en repassant ma chemise. Quel moral d’acier ! La prochaine fois, je vous parlerai d’autre chose.

10:55 Publié dans Humeur | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

C'était encore courant dans les années soixante, mais pour moi c'était presque banal : mon père était handicapé suite à une polyo enfantine qui ne lui avait laissé qu'un bras et une jambe valides, tous ses amis étaient des handicapés physiques, et je baignais dans un milieu de paraplégiques, de tétraplégiques, de boiteux, de manchots, d'unijambistes ou de victimes de thalidomide, parce que je vivais juste à côté du centre de réadaptation des handicapés où mon père avait étudié et que j'y ai un peu travaillé. Comment dire ? Cela me semblait normal de voir quelqu'un se déplacer en s'appuyant sur ses deux cannes ou sur un lit roulant. Et puis je me suis éloigné de mes parents, j'ai vu de moins en moins de ces survivants de la guerre ou des handicapés civils, mais je me dis que j'ai vécu une partie de mon enfance dans une sorte de cour des miracles et je ne pensais alors absolument pas du tout à la différence de ceux que je cotoyais. Je ne les voyais que comme des êtres humains pareils aux autres, sans me poser plus de questions. J'étais un peu inconscient comme tous les enfants ou adolescents, mais au fond je ne prenais que la réalité des personnes dans le présent et c'est après que j'y ai pensé quand ils n'étaient plus là.

Écrit par : Dominique | mercredi, 26 septembre 2007

Qu'ajouter ?

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 27 septembre 2007

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