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jeudi, 28 septembre 2006

De l’indexation quand elle est exotique

J’ai publié onze livres (douze, bientôt) ; neuf d’entre eux sont parfaitement disponibles : il y a un épuisé et un autre, disparu dans le naufrage de l’éditeur. On n’en trouve aucun en vente, même pas les deux derniers, parus en 2005 et consacrés à des artistes qui ont eux-mêmes un public, ce qui pourrait très éventuellement justifier la présence de ces ouvrages dans les fonds thématiques des librairies. Enfin, on trouve mes modestes travaux en Amérique, en Angleterre, au Centre culturel français de Pékin, dans des bibliothèques universitaires réparties dans le monde entier, bref, cela me console ou plutôt me fait rire : mes éditeurs sont des casseroles qui ne savent placer leurs parutions qu’auprès des institutions. C’est plus facile, plus immédiatement rentable.

L’indexation est une chose curieuse. Elle est très souvent erronée et, depuis l’apparition du courtage de livres sur internet, on s’aperçoit que toutes les chaînes de vente puisent aux mêmes sources. Les erreurs sont donc répétées à l’envi et personne ne s’avise, par exemple, qu’un titre comme Avec le livre, propos de  réflexion, ne signifie rien. Il fallait lire, évidemment : Avec le livre, propos et réflexions. De même, Spectacle hôtel n’a pas grand sens, le titre exact est Spectacle total. Enfin, Léo Ferré, la mémoire du temps est presqu’en permanence substitué à Léo Ferré, la mémoire et le temps. Cet essai se voit d’ailleurs, la plupart du temps, affubler de deux cent trente-sept pages dans les notices des vendeurs comme dans celles des bibliothèques, quand il en propose deux cent trente-huit. Cela n’a pas grande importance, certes, mais pourquoi ?

Il arrive que les éditeurs eux-mêmes se fourvoient dans leur propre indexation, ce qui n’est pas ordinaire. L’Harmattan, qui a publié On n’emporte pas les arbres, le fait figurer, dans son propre catalogue, sous la rubrique « Littérature, romans, nouvelles Océan Pacifique », on se demande vraiment pourquoi.

Ce même recueil, On n’emporte pas les arbres, doit à son titre de figurer sur un site qui recense les ouvrages consacrés à  la nature. C’est de l’interprétation au premier degré ou je ne m’y connais guère.

Dans la notice consacrée à Écrivains contemporains, toujours par son propre éditeur l’Harmattan, on peut lire : « Ce qui domine, dans ces monographies, c’est toujours le sentiment de l’affection », quand j’avais écrit, et le texte de quatrième de couverture le dit bien : « Ce qui domine, dans ces monographies, c’est toujours le sentiment, l’affection. »

Le douzième livre à paraître groupe deux pièces de théâtre portant le nom de leur personnage principal (Racine, qui me téléphone de temps en temps, me l’a vivement conseillé), Manon et Guillemine. En principe, je ne devrais pas avoir de surprise. Encore que… Peut-être lirai-je, dans les recensements divers, Canon et Cuisine ? Cela permettra au volume d’être indexé en « Militaria » et en « Ouvrages pratiques », pourquoi pas ? À moins que Guillemine ne devienne Guilledou, ce qui expédiera l’ouvrage en « Curiosa », qui sait ?

16:05 Publié dans Édition | Lien permanent | Commentaires (8)

Commentaires

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Écrit par : Dominique | jeudi, 28 septembre 2006

Certainement, mais ces appareils sont manipulés par des individus, pourtant.

Cela dit, je comprends bien qu'indexer des tas d'ouvrages dont on se moque copieusement n'a rien d'exaltant.

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 28 septembre 2006

"On n’en trouve aucun en vente, même pas les deux derniers, parus en 2005": euh, on trouve encore votre dernier livre sur Ferré dans les Fnac, y compris dans celles de Province. Alors, c'est sûr, votre Fnac (Italie) est assez dépourvue: les rares fois où j'y ai mis les pieds, je n'ai jamais trouvé les livres (pas spécialement rares) que je recherchais.

Un point positif pour les éditeurs: je trouve que les préfaces, les introductions, les dossiers, etc. des livres de poche (les classiques, donc) sont aujourd'hui de bien meilleure qualité que ce qu'on trouvait autrefois, dans les années 60, 70, 80. Très souvent, le propos était assez fumeux et restreint, y compris lorsqu'il s'agissait de textes des grands pontes de l'Université. Alors que maintenant, on a souvent affaire à de petits essais brillants, bien documentés.

Écrit par : gluglups | jeudi, 28 septembre 2006

On peut se procurer plusieurs de tes livres par Amazon. Ou ça ne compte pas ?

Écrit par : Guillaume | jeudi, 28 septembre 2006

Guillaume : sur Amazon et ailleurs, oui. Mais je parlais des librairies, les vraies, celles où ça sent le papier, où l'on peut feuilleter un livre dont on n'a jamais entendu parler, ce qui se nomme découvrir. Les ventes par internet (que je ne dénigre pas et utilise parfois moi-même, bien sûr) ne permettent pas cela. Elles ont un avantage, heureusement : elles ont supprimé la notion de livre introuvable. On peut acheter n'importe quel ouvrage, même à l'autre bout de la terre. Et ça marche.

Gluglups : la Fnac-Italie, c'est le summum du vide, c'est mon désespoir désespérant. Mais, depuis que je travaille boulevard de l'Hôpital, c'est le seul endroit où je puis trouver quelques livres à portée j'allais dire de fusil, durant l'heure du déjeuner. Ou plus exactement : constater qu'ils ne s'y trouvent pas. Les miens, ou d'autres, naturellement.

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 28 septembre 2006

Je m'aperçois que je n'ai pas répondu complètement. A propos des commentaires apportés aux oeuvres classiques dans les livres au format de poche, je ne peux m'empêcher d'observer que l'amélioration de l'appareil critique va de pair avec une forte augmentation des prix. Les collections de poche -- on a déjà dû en parler ici -- n'ont plus de poche que le format (et encore, pas toujours, avec l'apparition de ce qu'on nomme le semi-poche), pas le prix.

Autrefois, on faisait précéder une oeuvre classique de quelques pages déjà rédigées par un auteur célèbre, ou d'un extrait d'un de ses livres (par exemple, la "préface" de Sartre à Mallarmé en Poésie-Gallimard). On lui payait quelques droits, et c'était fini. Parfois même (toujours cet exemple), il s'agissait du même éditeur qui traitait donc... avec lui-même. Et souvent, la "préface" était un texte d'humeur, quelque chose d'affectif, de pas très critique.

A présent, il y a en général un préfacier à qui l'on commande des pages introductives inédites qu'il faut payer, et un commentateur (universitaire réputé spécialiste) à qui l'on demande l'appareil proprement dit et l'établissement éventuel de l'édition, avec variantes et développements. Cela coûte aussi de l'argent. Au bout du compte, c'est l'acheteur (l'étudiant, le jeune, souvent) qui paie.

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 29 septembre 2006

C'est bien pire dans le poche scolaire. Les éditeurs ont beaucoup donné dans l'édition savante qui peut convenir aux étudiants de lettres ou aux amateurs éclairés, mais ils se sont aperçus que le public des collèges, puis des lycées ne pouvait pas vraiment lire la présentation et les notes, que les enseignants déconseillaient ces éditions de classiques, que ce n'était pas attrayant. On a donc inventé toute une série de livres bien différents des Classiques Larousse et Bordas, avec un saucissonnage du texte, un questionnaire, des notes certes, mais surtout des jeux, des illustrations, des résumés culturels, bref tout ce que l'enseignant pourrait apporter lui-même. Et cela ne s'exerce pas seulement pour des livres classiques, mais pour des livres contemporains du fond de l'éditeur. La différence de prix entre un Folio et un Bibliothèque Gallimard peut être du simple au triple.

Écrit par : Dominique | vendredi, 29 septembre 2006

Jacques : bien sûr, je préfère, moi aussi, les librairies "réelles", surtout si ce sont de vraies librairies... :)

Écrit par : Guillaume | samedi, 30 septembre 2006

Les commentaires sont fermés.