vendredi, 04 août 2006
Les derniers seront les premiers
Je me suis toujours beaucoup étonné du destin des livres, j’entends : de leur cheminement dès qu’ils se retrouvent dans le circuit de l’occasion. Je me rappelle avoir acheté dans le Lot, il y a quelques années, un ouvrage portant, sur la page de garde, le cachet d’un couvreur du Nord. Comment le livre était-il arrivé là ?
Avant-hier soir, triant quelques volumes que je désire emmener demain à la campagne, je suis tombé sur le Journal des années noires 1940-1944 de Guéhenno. Ce livre, imprimé en 1947 pour le compte de Gallimard, m’avait été offert en 1985 et fut oublié par moi qui ne l’ai jamais lu, pas plus que son ou ses propriétaires précédents. Preuve irréfutable : il n’était pas coupé. Il est entièrement neuf, son papier à peine vieilli et encore. Je l’ai donc coupé et couvert et je le lirai dans le train. C’est amusant parce que j’ai effectué mon tri dans une partie seulement de ma bibliothèque, celle qui se trouve dans l’entrée et dans le couloir (il y a des livres dans toutes les pièces, hormis pour le moment dans la cuisine et la salle de bains.) Cette partie représente dix-huit mètres linéaires et, en réalité, davantage puisque les volumes sont parfois sur deux rangées et même au-dessus, en travers. Eh bien, c’est presque au ras du sol, sur la dernière tablette que, derrière la seconde rangée, tout au bout de la première, tout à fait à droite, encore dissimulé par plusieurs épaisseurs de tomes couchés en travers, j’ai trouvé ce journal. Pour la première fois depuis 1947, il va être lu. C’était le dernier des rayonnages consultés, le plus caché des livres et le plus oublié des titres.
14:45 Publié dans Humeur | Lien permanent | Commentaires (9)
Commentaires
Grand, très grand livre, d'une belle lucidité et d'une humanité profonde. Rien que le début, c'est un morceau que je mettrais dans un manuel scolaire... J'ai rouvert cette année des pages de Guéhenno parce que je voulais en donner sur mon blogue, mais j'ai eu du mal à savoir où couper, s'arrêter.
Écrit par : Dominique | vendredi, 04 août 2006
Merci, Dominique. Je n'ai lu pour l'instant que l'introduction et les notes de deux ou trois journées. En effet, ça a l'air d'une grande hauteur de vue et d'une douloureuse exactitude humaine.
Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 04 août 2006
C'est la saison où l'on trie les livres. Je connais au moins trois personnes (moi comprise) qui sont actuellement dans ce processus. Effot surhumain pour n'éliminer qu'une infime partie d'une bibliothèque éternellement foisonnante...
Écrit par : fuligineuse | samedi, 05 août 2006
Dans le Lot ? Tel est-il ton lot ?
Écrit par : MuMM | dimanche, 27 août 2006
Bon retour (si la bannière ne ment pas) !
Écrit par : MuMM | jeudi, 31 août 2006
Non, la bannière ne ment jamais. Nous sommes bien là, après 560 km. Mais je n'ai rien écrit de nouveau.
Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 31 août 2006
« Mais je n'ai rien écrit de nouveau. »
Mais ça reviendra aussi, c'est juste un peu à la traîne, encore un peu là-bas, comme un enfant qui dit "j'arrive" mais se dépêche de cueillir les dernières mûres.
Écrit par : lamkyre | jeudi, 31 août 2006
Merci Lamkyre, c'est très exactement cela. J'aime cette façon de sentir les choses.
Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 31 août 2006
J'avoue avoir passé six semaines à becqueter des mûres...
Écrit par : MuMM | vendredi, 01 septembre 2006
Les commentaires sont fermés.