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mercredi, 19 avril 2006

Varia, 2

Mme Stirbois est décédée. On ne la regrettera pas. J’ai rarement vu et entendu quelqu’un d’aussi haineux, d’aussi dur, d’aussi mauvais.

 

Démêlés constants avec les éditeurs qui ne respectent pas leurs engagements contractuels, en particulier au moment de la reddition des comptes. Contacts pris avec un avocat à qui j’ai soumis deux dossiers. J’attends sa réponse pour savoir s’il accepte de s’occuper de mes petites préoccupations.

 

Comment ne pas voir la tendance généralisée, en ce moment, au téléfilm de semi-fiction : Le Grand Charles, Le Procès de Bobigny, Les Amants du Flore, L’Adieu, L’Âge des passions… Des reconstitutions soignées et, le plus souvent, un résultat sans intérêt, du moins pour ceux que j’ai pu regarder car la télévision, on le sait, m’ennuie beaucoup. À part Le Procès de Bobigny dont j’ai un peu parlé ici-même, le reste… En tout cas, une constante : de la guerre aux années 70, on considère maintenant qu’il s’agit d’histoire. On reconstitue.

 

Mon collègue de bureau porte un nom plutôt courant et un prénom qui ne lui autorise pas suffisamment d’originalité pour éviter la rencontre d’homonymes. Je lui parlais de ces fréquentes homonymies, alors que je venais de lire un article consacré à une librairie dont le gérant s’appelait exactement comme lui, nom et prénom.

Lui :

- On va voir si tu as des homonymes, toi.

- Des Jacques Layani, il y en a au moins quatre.

Ce qui est rigoureusement exact.

Lui, les pieds dans le plat de Google :

- Oh, qu’est-ce que tu as  comme homonymes ! Jacques Layani, Jacques Layani… Ah mais, Jacques Layani, c’est un écrivain, en fait.  Il a écrit Albertine Sarrazin, une vie et puis Dix femmes, et puis…

Leçon d’humilité.

 

François Angelelli, « mon plus vieil ami sur la terre », ainsi que j’ai coutume de le désigner, est de passage  à Paris pour deux jours. Nous nous connaissons depuis quarante ans. Près du Panthéon, j’ai envie de l’emmener admirer Notre-Dame-du-Mont, cette petite église de la montagne Sainte-Geneviève, toute d’harmonie et de proportions, que je tiens pour un joyau. Je voudrais qu’il la découvre. Nous entrons en pleine messe : c’est le dimanche de Pâques. On ne circule pas durant les offices. Raté. À défaut de pouvoir lui montrer, près l’autel de la Vierge, le pilier sous lequel sont enfouis les restes de Racine, de retour de Port-Royal, je lui rappelle que, là, fut célébré le service funèbre de Verlaine, décédé à quelques dizaines de mètres, rue Descartes. Dans l’assistance, figurait Paul Fort. Cela fait trois poètes chers à  mon cœur. Je lui raconte, en partant, qu’il y a quelques années, un soir, je passais dans l’église en question, attendant, ô païen, l’heure de la séance d’un cinéma de la rue des Écoles. Dans la demi-pénombre, une petite dame, bien âgée, s’approche :

- Monsieur...

- Madame.

- Vous êtes prêtre ?

On ne me demande pas ça tous les jours. Avec toute la politesse dont je puis être capable :

- Ah, non, madame, non.

Elle, posant sur ma manche une petite main fragile, ancienne, une main en dentelle, et avec un air mi-confus, mi-complice :

- Vous en avez l’air.

08:59 Publié dans Humeur | Lien permanent | Commentaires (44)

Commentaires

Des histoires d'homonymes, j'en ai pas mal puisque je porte des noms très courants... Je reste juste dans ma famille car sinon ce serait trop long. Il y a vingt ans, je recevais régulièrement le courrier de mon homonyme exact qui habitait la rue voisine, à cent mètres ; on s'est aussi mis l'un et l'autre en liste rouge dans le même temps (le troisième homonyme dans la même ville ne m'a pas donné signe de vie). J'ai découvert il y a trois ou quatre ans que j'avais un homonyme exact qui vivait dans un foyer pour personnes en fin de droits sociaux et qui avait entamé une action en justice contre quelqu'un, j'ai dû refuser l'exploit d'huissier en recommandé et justifier cela. Je me suis toujours demandé quelle était son histoire. Mon père a été convoqué et interrogé par la police : un de ses homonymes signait des chèques sans provision dans des palaces de la Côte d'Azur et il habitait la même ville auparavant. Cela lui a empoisonné la vie pendant deux mois parce qu'il y avait aussi des actions déjà entreprises sur un de ses comptes en banque. Mon frère a fait passer des rectificatifs dans la presse parce que son homonyme du même âge et habitant un village voisin avait tué deux personnes en conduisant comme un chauffard.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

Fichtre ! C'est effectivement beaucoup plus grave. Je n'avais jamais pensé aux ennuis de ce genre. Il faut donc, dans ce cas, passer son temps à prouver qu'on est soi et pas l'autre ? Est-ce que, la vérité établie, on a au moins droit à des excuses ?

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Durant l'occupation de la France par les Allemands, certaines confusions de cet ordre ont envoyé des gens dans les camps.

Écrit par : Martine Layani | mercredi, 19 avril 2006

Ton histoire de curé est très drôle... (mais je ne suis pas de l'avis de la dame). Un détail : je pense que tu veux parler en fait de l'église Saint-Etienne du Mont. J'ai habité plusieurs années dans son ombre.

Écrit par : Fuligineuse | mercredi, 19 avril 2006

Oui, son nom est Saint-Etienne-du-Mont. Mais elle est connue aussi sous l'autre appellation, Notre-Dame-du-Mont. Tu as habité là ? Mazette !

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Bien sûr, la vie c'est passer notre temps à prouver qu'on existe. La philosophie n'est pas si vaine. Elle a des implications réelles dont l'identité. Le civil et la civilisation, tiens, ça c'est un sujet que je donnerais bien.

Écrit par : Martine Layani | mercredi, 19 avril 2006

Martine Layani : Durant l'occupation de la France par les Allemands, certaines confusions de cet ordre ont envoyé des gens dans les camps.

Cela fait penser à Monsieur Klein qui s'inspire de faits réels, mais on trouve encore beaucoup d'exemples récents (je me souviens d'un retraité qui ne pouvait toucher sa pension car il était supposé mort). Celui-ci date de quelques jours :
http://www.liberation.fr/page.php?Article=375364
Les camps d'extermination et puis la prison ou l'absence de ressource ne sont bien sûr pas à mettre sur le même plan.

Jacques Layani : Est-ce que, la vérité établie, on a au moins droit à des excuses ?

Je ne peux parler que pour mon cas. Le directeur du centre de La Poste (qui était la seule responsable de l'erreur) a été vraiment correct, mais j'avais passé l'après-midi pour rapporter les documents prouvant que j'occupais mon logement de longue date et que j'étais salarié, fonctionnaire depuis vingt ans, sans avoir dû à me rendre dans un foyer pour déshérités. Heureusement, c'était le destinataire qui avait porté plainte et qui n'était pas l'objet de la plainte, cela suffisait à prouver ma bonne foi. Mais j'ai passé quatre heures à m'occuper des affaires d'un inconnu qui m'est toujours inconnu. Ce double surgi de nulle part m'a fait rêver.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

Je ne pensais plus à M. Klein, c'est juste. Je n'imaginais pas une telle absurdité (l'article cité en lien).

C'est dans ce genre de cas que les prénoms multiples ont une raison d'être. Je n'en ai qu'un, ma soeur aussi, mes enfants également.

Cependant, le numéro d'Insee fait forcément la différence, non ?

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Il y avait une telle confusion pendant la guerre qu'on trouvait des Allemands dans nos villes et dans nos villages.

Écrit par : Jul | mercredi, 19 avril 2006

Pour les prénoms multiples, j'ai encore des anecdotes familiales. Du côté de ma mère, les Claudel, les prénoms sont en nombre très limité. Il s'est donc trouvé deux Marie Jeanne Eugénie Reine Claudel dans la même classe d'école d'un petit bourg la même année (la moitié de la population s'y nomme Claudel et toutes les filles sont des Marie). L'instituteur a voulu les différencier en se rapportant aux noms et prénoms des parents, échec. Il a fallu remonter aux grands-parents pour trouver un prénom différent. C'était bien avant les numéros de sécurité sociale. Mais figurez-vous que j'ai été pendant deux ans inscrit à la Sécurité sociale avec un numéro en 0 (chiffre qui figure sur mes fiches de paye de l'époque), je m'en suis aperçu seulement lorsque j'ai dû me faire rembourser des médicaments.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

Alors ça, je n'en reviens pas. Homonymie totale sur plusieurs générations ? Foutre !

Les numéros de Sécurité sociale en 0 sont en général des numéros provisoires. Ma fille Fanny en a eu un durant longtemps. Il y a quelquefois des cafouillages lors de l'immatriculation, je n'ai jamais compris pourquoi, compte tenu de la rigueur des nombres qui la composent. J'ai été immatriculé en troisième, pour le BEPC, il n'y a jamais eu de problème ensuite. Je crois qu'à présent, les jeunes reçoivent un numéro au moment du baccalauréat, dans l'ensemble.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Oh, puisqu'on parle de patronyme, j'ai une question qui me trotte dans la tête depuis quelques temps déjà. Il existe un certain Gérard Layani, qui a composé quatre chansons pour Johnny Hallyday, dont le slow d'épouvante "Requiem pour un fou". Serait-il, par le plus grand des hasards, de ta famille?

Écrit par : Richard | mercredi, 19 avril 2006

Non, il n'est pas de ma famille. Tu sais, il y a énormément de Layani, de branches très différentes.

En revanche, les trois autres Jacques Layani sont : le fils d'un cousin de mon père ; un agent immobilier de Toulouse ; un peintre en lettres. Je ne connais que le premier (encore ne l'ai-je plus vu depuis les années 50). Le second, je l'ai trouvé dans Google. Le troisième, j'ai appris son existence en recevant un soir un coup de fil de quelqu'un qui cherchait à le retrouver et pensait que c'était moi.

Il y a aussi un Jean-Jacques Layani (Google ignore le trait d'union qui fait le prénom composé).

Et des milliers d'autres, avec tous les prénoms.

Ce qui m'effraie, c'est l'intelligence des robots spammeurs, comme on dit. Ils m'envoient des spams avec des expéditeurs "ciblés". Je reçois ainsi une kyrielle de spams soi-disant expédiés par des Layani divers. J'en reçois aussi, d'ailleurs, qui sont en théorie expédiés par... Dominique ! Le plus marrant, c'est le nombre de messages non désirés qu'est censée m'expédier... Martine !

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

En Belgique, on reçoit à la naissance un numéro de registre national qui sert pour toutes les circonstances, sécurité sociale ou autres.

Mon prénom est assez rare ici et j'ai passé toute ma scolarité sans rencontrer la moindre Marianne. Actuellement, j'en connais encore très peu, mais l'une de mes quatre collègues s'appelle ainsi. Cela prête parfois à confusion quand on s'interpelle d'un bureau à l'autre. Comme je suis la dernière arrivée, je me sens en cours de renommage : "Marianne l'autre".

Jacques, je pense que les courriels censés venir de Martine ou de Dominique sont des virus plutôt que des spams.

Écrit par : lamkyre | mercredi, 19 avril 2006

Chère-Marianne-pas-l'autre-mais-vraiment-la-mienne-car-je-n'en-connais-pas-d'autre, ce sont effectivement des virus. J'utilise, et j'ai tort de le faire, c'est vrai, le mot "spam" pour désigner tout message non souhaité.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

JL : Alors ça, je n'en reviens pas. Homonymie totale sur plusieurs générations ? Foutre !

Cela explique pourquoi dans les documents anciens du bourg en question les gens ne sont pas simplement désignés par leurs nom et prénoms lorsqu'il y a des contrats, mais aussi par leur filiation (Djîn, Colon, Thiry, Mathis, Ferry). On est dans la situation d'un isolat où chacun est le fils ou la fille de quelqu'un d'autre, exactement comme en Corse ou dans les villages italiens du sud, dans lesquels il y a énormément de patronymes et non de sobriquets ou de toponymes ou de noms de métiers. Les mêmes prénoms sont repris de génération en génération et souvent dans le même ordre (mon prénom par exemple ne doit rien à la mode des années soixante, il était présent dans ma famille paternelle depuis au moins le XVIIe s.) Cela explique aussi le fait que l'immense majorité des noms de familles vosgiens sont en fait des prénoms et des déformations de prénoms comme Ferry, Claudel (ou même des dérivés comme Grosdidier, Grandidier, Didierjean, Didierlaurent, Didierpierre) parce que tout se faisait par la filiation sans véritable notion de famille, que les estrangers étaient accueillis avec leur seul prénom comme Hans ou Claus (dans ma famille aussi) sans mention d'un métier ou d'un lieu d'origine. Il y a plusieurs logiques en conflit : l'une qui remonte aux ancêtres un peu comme les Scandinaves, les Slaves, les Hébreux et les Arabes, une autre qui donne à chacun une identité unique par des précisions. Le stock limité de prénoms était en fait combattu par l'établissement de la filiation jusqu'au moment où la démographie ne le permettait plus.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

Très étonnant. Je ne crois pas avoir observé ça dans un autre endroit de France. Pas à ce point, en tout cas.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Penchez-vous sur les noms corses ou siciliens et vous verrez exactement le même phénomène (je ne me suis pas interrogé sur les noms basques ou tyroliens). Les pays de montagne sont en fait très proches malgré la distance, ils agissent presque de la même façon avec les mêmes structures de pensée, différente de celle des peuples de la plaine ou de la côte ou du désert. Je ne vais pas m'aventurer sur une comparaison climatique du type Montesquieu, mais je crois qu'il existe une mentalité, un langage et une forme d'ordre nés de la géographie.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

"je crois qu'il existe une mentalité, un langage et une forme d'ordre nés de la géographie."

Bien entendu. C'est parfaitement exact. C'est l'importance que tout ça semble avoir pris en Lorraine qui m'étonne beaucoup.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Dans les Ardennes, belges comme françaises, on désigne encore les gens par leur prénom précédé de celui de leur père, avec en plus le fameux article: "c'est le Dominique du grand Jacques..."

La filiation semble donc conférer à l'individu une légitimé qu'il ne parviendrait pas à acquérir sans cela. Vous êtes moins ce que vous êtes (ou ce que vous faites) que ce qu’ont été vos parents.

En cas de confusion, on précise : « Quel jacques ? » « Celui de tel lieudit, le maçon. »

Tout cela est dit en patois local, bien entendu.

Je me souviens que dans ces villages, il y a une quinzaine d’années encore, un « étranger » ne désignait pas un Arabe ou un Albanais, mais bien quelqu’un d’extérieur au village, quelqu’un, finalement, dont on n’avait pas connu les parents et dont on ne pouvait donc deviner la valeur.

Tout citadin qui s’implantait dans la région était aussi un étranger.

Maintenant, tout cela se perd. Les personnes âgées sont décédées, les villages sont devenus des déserts et la moitié des maisons ont été transformées en secondes résidences. Les mentalités changent.

Écrit par : Feuilly | mercredi, 19 avril 2006

Dans toute l'Occitanie, est estranger celui qui vient de la vallée d'à côté (vingt kilomètres, tout au plus). D'ailleurs, il arrive que, d'une vallée à l'autre, la langue diffère.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Une partie de la Lorraine et en fait seulement des Vosges (même si c'est un peu vrai dans les autres Vosges) : les Hautes-Vosges où l'importance des vallées est énorme et où il existait des républiques avec leurs propres règles dans le duché.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

En Wallonie, où la présence du patois reste forte par rapport à la France (où les dialectes furent victimes du centralisme parisien, surtout après la Révolution), on peut estimer que la langue diffère insensiblement d'un village à l'autre.

Ceci dit, on distingue trois wallons (Ouest, Centre et Est). Le pays est donc divisé en bandes verticales au sein desquelles on peut estimer que les locuteurs se comprennent relativement bien. A l’extrême Ouest, il ne s’agit plus de wallon mais de picard. Au Sud, il y a aussi trois villages qui parlent le champenois.

Écrit par : Feuilly | mercredi, 19 avril 2006

"Dans les Ardennes, belges comme françaises, on désigne encore les gens par leur prénom précédé de celui de leur père, avec en plus le fameux article: "c'est le Dominique du grand Jacques..."

C'est (c'était ?) aussi encore le cas en Acadie, et dans le Québec rural. "C'est l'Dominique à Jacques à Raymond." On peut remonter l'arbre comme ça.

"Ah mais, Jacques Layani, c’est un écrivain, en fait."

Pourquoi humilité ?
Seriez-vous devenu "prisonnier de la gueule qu'on vous a faite" ? :o)
Les traces que vous laissez derrière vous, elles disent "Ah mais, Jacques Layani, c'est un écrivain..."

Écrit par : Benoit | mercredi, 19 avril 2006

Je m'amuse beaucoup. Ma note -- un bien grand mot -- effleurait cinq sujets, les deux derniers, parfaitement authentiques, étant rédigés de manière à faire sourire.

A part Fuligineuse qui a relevé l'histoire du prêtre, un seul sujet a retenu l'attention de tous, celui de l'homonymie. Et l'on a glissé, insensiblement, au cours de la journée, vers les langues locales de Belgique.

Je trouve ça formidable. Ce sont les méandres de la conversation. A l'oral, c'est quelquefois difficile, mais par écrit, c'est très plaisant à suivre. Je vous remercie tous.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Mon commentaire a croisé celui de Benoît.

Pourquoi humilité ? Parce qu'à mon travail, personne ne sait que j'ai commis quelques petites choses imprimées. Par conséquent, lorsque l'information est mise sous leurs yeux, ils n'imaginent même pas qu'il puisse s'agir de moi.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Benoît : C'est (c'était ?) aussi encore le cas en Acadie, et dans le Québec rural. "C'est l'Dominique à Jacques à Raymond." On peut remonter l'arbre comme ça.

C'est l'origine de nombreux noms de famille. Si on voit Aujames, c'est en fait le fils de James ou Jacques (James étant une forme parfaitement française), si c'est Depierre, c'est le fils de Pierre et non celui qui vit sur une pierre. La forme à/ au est plus propre à l'ouest et elle a pu donc se trouver au Québec ; en Lorraine, c'est juste une accumulation de noms sur la forme germanique sans aucune préposition.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

Je me suis mal exprimé, ou ma tentative d'humour via la citation de Gombrowicz via Gary est passé dans l'beurre.

Je trouve ça fascinant, votre petite histoire. S'ils ne le savent pas (et tout le monde n'est pas forcé de connaître les écrivains, même les plus célèbres), alors lorsqu'ils tombent sur Jacques Layani écrivain, c'est que c'est la référence première sur laquelle il tombe lorsqu'ils cherchent, et vous trouve, sans savoir que c'est vous. Vous pouvez alors mesurer un peu de ce que Gombrowicz puis Gary appelaient être "prisonnier de sa gueule."
Qui donc est Jacques Layani ?
L'écrivain ou le collègue de bureau ?
C'est le même ?!!!!
Mais non, c'est un prêtre voyons...
On le voit d'ailleurs souvent à Notre-Dame-du-Mont.
Il a l'air inspiré et tout pénétré de l'Esprit Saint.
Les croyants viennent d'ailleurs vers lui en confiance.

Écrit par : Benoit | mercredi, 19 avril 2006

Non, Benoît, la citation n'était pas passée à côté.

Simplement, une chose me travaille. En règle générale, je ne raconte pas ce que je fais à mon travail. Je l'ai fait, cependant, deux fois (étais-je naïf !), en me disant qu'après tout, puisque je présentais un CV, il n'y avait pas de raison d'occulter cette partie de mon activité (d'autant qu'on le sait ici, c'est bien plus qu'une *activité*). Eh bien figurez-vous que, les deux fois, ça a mal tourné : jalousies et même, une fois, mise au placard. Je vous jure que je n'en rajoute pas. Alors, maintenant, je ne le dis plus.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Vraiment bizarre les réactions.

Cela dit, aucune garantie qu'il y aura communauté d'intérêts avec les collègues. Il me semble que généralement, les milieux de travail sont de plus en plus difficile à humainement "gérer". On se retrouve avec les problèmes de tout un chacun dans le cours même du travail, ça devient parfois de la thérapie de groupe.
Je cherche du travail beaucoup plus ran plan plan.
On m'a dit que j'avais beaucoup de talent pour "gérer" la Ressource humaine, mais c'est pas parce qu'on le fait bien qu'on aime ça. J'en ai un peu ma claque.
Alors ran plan plan.
Ça laissera plus d'énergies pour "mon activité".

Ça ne vous manque pas, cependant, de n'avoir pas au moins quelques interlocuteurs avec qui partager cela ? Le travail, ça mange tout de même beaucoup de notre temps. Ainsi, je trouverais difficile de garder pour moi le simple plaisir, que dis-je, l'excitation, que mon prochain voyage new-yorkais, pour mon "activité", me procure.

Écrit par : Benoit | mercredi, 19 avril 2006

En tout cas, une constante : de la guerre aux années 70, on considère maintenant qu’il s’agit d’histoire. On reconstitue.

Il y a eu il y a dix ans deux séries de téléfilms sur Arte où l'on reconstituait la jeunesse des différentes époques depuis les années 50. Cela m'a fait tout drôle de voir que l'on a tourné dans ma propre ville un de ces téléfilms (très mauvais, au demeurant), le casting demandait aux figurants d'avoir les cheveux longs comme en 78-80 (époque supposée du film vu les références à Grease et à Saturday Night Fever), mais euh... même en province on n'était pas nombreux à avoir les cheveux longs et on n'était pas alors très portés sur la disco (j'avais les cheveux longs et j'écoutais du punk ou de la new-wave autant que de la progressive ou de la soul, mais pas de la disco).
Il y a des tas de trucs amusants dans ce film que je n'ai jamais passé à des élèves pour des causes évidentes (suicide final, incendie gratuit). Tous les lieux font bien années 70-80, mais quand on est sur place on voit que c'est un plan pris à tel endroit, le suivant à un autre endroit qui se trouve à deux kilomètres. Le fun du fun, c'est la façade d'une école primaire des années 50 qui a été prise comme l'entrée du lycée très bourgeois et de centre-ville (lequel a en fait un look très IIIe République), le décor avec plaques bleu et jaune fluo faisait kitsch au possible, mais on a évité alors la petite porte médiévale qui avait été conservée ou les maisons Renaissance à côté et on a juxtaposé des images de l'entrée d'un horrible collège de banlieue type Pailleron à trois kilomètres de là. Puis comme si cela ne suffisait pas, on a fait circuler un bus sur un chemin absolument improbable (puisque l'héroïne serait censée sortir du chemin de halage).
Et puis quand j'ai vu le film, je me suis demandé si en fait il n'y avait pas eu un mélange du début des années 70 à cause des couleurs nulles à la Mathieu (marron, vert sombre, orange), des pantalons pat'd'ef, rouflaquettes, cols pelles à tarte, et puis de la fin des années 70 pour la musique. Une sorte de collision d'époques, mais il y a un monde entre ces deux moments, tout comme entre le début et la fin des années 60. Mais cela m'a fait tout drôle d'être le double sujet d'une étude historique : à la fois comme sujet du lieu et comme djeune de l'époque (mes 20 ans sont alors).

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

Eh oui ! C'est un peu ce que je racontais dans la note "Bobigny, 1972", faite il y a quelques jours. Bien sûr, quand on connaît les lieux, ça marche moins bien. On sait bien que c'est tel endroit, pas tel autre.

Ce qui est effectivement plus ennuyeux, c'est de considérer comme un même moment ce qui s'étend sur une décennie. Cela vient de la manie anglo-saxonne des 50's, 60's, 70's, etc. Comme si la vie se découpait aussi facilement ! Il y a effectivement un monde entre les premières années 70 et les dernières, la charnière se situant entre 1973 (premier "choc pétrolier") et 1976 (arrivée de Raymond Barre et de sa politique de rigueur, en même temps que création du RPR par Chirac, qui prendra la mairie de Paris en 1977).

Un découpage plus sérieux serait : 1945-1958 ; 1958-1968 ; 1968-1973 ; 1973-1981 ; 1981-1989, etc. Chaque fois, correspondent à ces dates des fractures historiques, politiques, économiques. Alors qu'un découpage en décennies "rondes" est artificiel.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 19 avril 2006

Cela ne marche pas pour les modes vestimentaires et musicales. L'apparition du disco c'est 78 en France. Et quand je repense à mes amis qui écoutaient cette abomination, ils avaient des pantalons à carreaux très étroits en tube d'alumette et pas du tout sur le modèle Mike Brandt, des vestes cintrés à la mode ska, ou bien une tenue très ordinaire qui serait presque la même que celle d'un jeune lycéen aujourd'hui sans aucune couleur remarquable comme l'orange ou le jaune. La coupe des jeans a changé, mais ce genre de détail ne devait pas être assez signifiant. En fait, le défaut c'est de vouloir faire époque en ajoutant les signes qui font le plus l'époque, un peu comme lorsque Jeanne Bourrin farcit ses textes d'expressions pseudo-médiévales qui n'existent en fait que dans les textes contemporains ou en mélangeant les siècles.

Écrit par : Dominique | mercredi, 19 avril 2006

En fait, cette interpénétration est tout à fait naturelle. Les effets de mode ne sont jamais calqués sur des dates précises. Ainsi, le disco commence vraiment autour de 1974-75. Il a fallu un autre deux ans pour que cette mode soit récupérée ou simplement reflétée dans un film hollywoodien. Ce qui se passait dans les clubs des grandes villes est devenu monnaie courante après Saturday Night Fever. La mode disco a connue son chant du cygne en 1979. Lui succède la new-wave. Le punk ? C'est 1976, AVANT l'explosion disco. Les Sex Pistols sont déjà de l'histoire ancienne en 1980. Mais les mohawks fleurissent pendant toutes les années 80.

Ainsi, si on fait un film dont l'action se situe parmi des jeunes branchés sur la musique d'alors, dans une grande ville en 1980, ils seront déjà passés à autre chose que le disco. Si l'action se déroule en province, Donna Summer et autres Bee Gees tourneront encore dans les quelques clubs de la ville ou du village que les personnages fréquentent.

Pour le découpage, la rondeur convient aux USA. Les folles années 20, la crise des années 30, les années de guerre, les Fifties bien sage de papa Eisenhower, les années 60 des Kennedy et Luther King, du Vietnam, les 70's du désenchantement, de la ME GENERATION et de Watergate etc. Je crois qu'il ne faut pas oublier l'impact extrême de la culture populaire sur ces définitions américaines.

Peut-on, dans l'histoire française, véritablement parler d'une ère, d'une période auquelle les gens peuvent s'identifier via les vêtements, la musique le cinéma, d'une part, et de l'autre faire référence au choc pétrolier par exemple, comme point de référence global ?

Le découpage américain fait référence aussi bien aux mouvements politiques, sociaux, que culturels, simultanément. Ma perception de l'effet de Mai 68 par exemple, sur la musique populaire en France, c'est qu'au moment même des évènements, on est encore soit dans le yéyé, soit dans la chanson. Mai 68 fait exploser les carcans et c'est après seulement que tout un courant nouveau finit par émerger (Brigitte Fontaine, Higelin, Manset, mais aussi un certain renouveau de la chanson populaire façon Jonasz Souchon etc ). Aux USA, l'explosion a d'abord eu lieu culturellement, elle accompagne les troubles de 67-68-69. Les chansons qu'on a utilisé dans tous les films sur le Vietnam par exemple, sont presque des commentaires sur l'action du moment. Au point ou dans le récent Jarhead (sur la 1ere guerre en Iraq), l'un des personnages commente le fait que la musique qui les accompagne dans leur guerre n'est pas synchro avec l'époque. On écoute encore les Doors. C'est l'entrée du commentaire sur la perception culturelle d'un évènement guerrier par le soldat lui-même. Là ou le soldat des années 60 utilisait la musique de son temps pour dire son désaccord (puisque lui-même ne le pouvait), celui de 1991 voudrait sa propre musique, mais il n'a aucun discours, opinion, sur le bien fondé de SA guerre. Et sa musique n'en dit rien non plus.

Je ne sais pas si c'est mon âge qui parle, mais je ne vois plus, après 1990-91, une véritable coalescence du social, du politique et du culturel. Ce n'est sûrement pas la Fin de l'Histoire comme disait l'autre, mais son accélaration, qui peut-être, rend tout plus flou ? Plus le temps de s'incruster, tout passe comme l'éclair.
Ou peut-être ai-je simplement besoin de nouvelles lunettes.

Écrit par : Benoit | mercredi, 19 avril 2006

Je me plaçais uniquement sur le terrain historique, politique, économique. Les phénomènes de mode, qu'elle soit vestimentaire ou musicale, sont autre chose et cela mériterait des développements plus larges. Merci à vous deux pour ces commentaires très intéressants.

Je relève deux choses extrêmement vraies : "le défaut c'est de vouloir faire époque en ajoutant les signes qui font le plus l'époque", dit Dominique. "Je ne vois plus, après 1990-91, une véritable coalescence du social, du politique et du culturel", dit Benoît. Je me case cela dans un coin de la tête. J'y reviendrai, je pense, dans une note spécifique, dans quelque temps.

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 20 avril 2006

Benoît : "dans une grande ville en 1980, ils seront déjà passés à autre chose que le disco. Si l'action se déroule en province, Donna Summer et autres Bee Gees tourneront encore dans les quelques clubs de la ville ou du village que les personnages fréquentent."

J'avais remarqué qu'en province les modes ont toujours plus ou moins de *retard* par rapport aux grandes villes. Quant aux B.G. (que soit dit en passant j'aime toujours, parce qu'ils ont un charme infini) dans les années 80, c'était un peu moins bien quand même.

Sur le sujet "on a tous quelque chose à dire : combien de temps ça dure ?", il y aurait un bon sujet, aussi.

Écrit par : Martine Layani | jeudi, 20 avril 2006

Oui, les Bee Gees, c'est de la pop bien sucrée, qu'on a fini, par association, par estampiller disco, alors que 'Jive Talkin' par exemple, est beaucoup plus près du R&B et n'a strictement rien de disco.

Plaisir coupable, mais faut dire que ces chansons datent de 74-75, AVANT la mode disco et ça tournait sur des stations rock, à l'époque on pouvait aimer Led Zeppelin ET les Bee Gees. Après Saturday Night Fever, impossible d'avouer qu'on aime quelques chansons des Bee Gees publiquement sans passer pour un ringard fini. Vous aurez beau insister que vous avez un seul disque des Bee Gees sur plus de 200, vous pourrez souligner avoir la discographie complète de Gentle Giant, les classiques de Miles Davis et plein de chanson française et de Brésil, vous aimez les Bee Gees ? Crédibilité: zéro.
Autre beau sujet ça: le snobisme culturel à travers les âges.

Écrit par : Benoit | jeudi, 20 avril 2006

Ah, les Bee Gees. J'ai moi-même considéré ce groupe comme ringard, rétrospectivement en regardant d'un oeil torve la période disco, à l'époque où l'on essae de se façonner une respectabilité en affichant des goûts musicaux les plus éloignés de ceux de ses parents. Aujourd'hui, j'ai tous les albums des Bee Gees dans ma discothèque, du moins ceux parus entre 1965 (le premier) et 1979 (Spirits having flown, excellent disque post-disco). Pourquoi cet engouement? Parce qu'à la longue, je trouve que ces frangins, durant ces années-là, ont su composer de sacrées pépites, passant sans morfler de la pop façon Beatles (sans rougir de la comparaison avec les scarabées) à des choses countrysantes de bon aloi, faisant preuve d'un idiosyncratisme mélodique assez peu égalé. L'album qu'ils composèrent pour Dionne Warwick au début des années 1980 était très bien aussi. Après, les choses se sont corsées, ou plutôt affadies, aseptisées et finalement ankylosées. Mais pour des albums comme Horizontal, Idea, Children of the World ou même des choses moins connues comme Cucumber Castle, Odessa, M.Natural ou Main Course, je hisse les Bee Gees parmi les disons vingt meilleurs groupes de pop music. Merci Benoît.

Écrit par : Richard | jeudi, 20 avril 2006

J'aime les Bee Gees et je m'en fous pas mal de passer pour ringarde (aux yeux de qui ?) Mais ce n'est pas cela que je voulais dire, je voulais revenir (esprit de l'escalier) sur la question des prénoms et des homonymes. En Grèce, pays que je connais disons assez bien, il est d'usage (encore maintenant) de donner aux enfants le prénom du grand-père ou de la grand-mère (donc si vous avez d'abord quatre enfants, deux filles et deux garçons, vous pourrez choisir enfin le prénom du numéro cinq). Ce qui donne beaucoup d'homonymies, car les fils de deux frères vont donc s'appeler exactement pareil. Souvent les (jeunes) parents râlent contre cet usage, surtout quand le grand-père portait un prénom ancien et démodé, mais ils y sacrifient quand même, quitte à appeler couramment l'enfant d'un diminutif plus "moderne".

Écrit par : Fuligineuse | jeudi, 20 avril 2006

Tu as raison Fuli, *ringard* c'est du racisme anti-adulte, anti-souvenir et sentiments, tout simplement, bref. . .
C'est drôle de voir combien on est nombreux à se souvenir des mêmes choses, dans tous les pays (oui, je sais Jacques, c'est international, mais la qualité aussi).

Quant aux prénoms, une tradition comme le port des deux noms des parents, à la xème génération, si on la respecte, ça devient inouï au sens fort.

Écrit par : Martine Layani | vendredi, 21 avril 2006

Cela me fait penser à "Cent ans de solitude", de Garcia Marquez, où tous les protagonistes ont à peu près le même nom de père en fils.

Écrit par : Feuilly | vendredi, 21 avril 2006

Oui, c'est une tradition espagnole, effectivement. Je trouve que c'est un peuple très conservateur ; ils conservent jusqu'à leurs noms :-))

Écrit par : Martine Layani | vendredi, 21 avril 2006

La phrase de Martine, "C'est drôle de voir combien on est nombreux à se souvenir des mêmes choses" me fait irrésistiblement penser au Je me souviens de Georges Perec... qui recense effectivement un tas de petites choses qui ont été dans l'air du temps à un moment donné et qu'on a aussi oubliés ensemble.

Écrit par : Fuligineuse | vendredi, 21 avril 2006

Quelle vilaine phrase pleine de subordonnées qui s'enchaînent...

Écrit par : Full Iggy News | vendredi, 21 avril 2006

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