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samedi, 10 février 2007

Des racines, par Martine Layani-Le Coz

Du matin au soir, Firmin travaillait à l’hôpital de Bicêtre, comme infirmier. Ensuite, il allait au Fort, cultiver un bout de jardin. Justine, entre deux lessives sans machine, cousait les vêtements de la famille, quand des commandes pour quelque particulier lui en laissaient le temps. Leur vaisselle venait de primes, de collections sorties des chicorées ou de paquets de biscottes. Tous les restes étaient accommodés en leur temps. La discipline dans laquelle étaient tenus les trois enfants était courante et sans contestation. Ils n’étaient pas dans la confidence des profits et pertes.

Cependant, tous les enfants grandissent un jour. La première fille, Yvonne, avait trouvé du travail, mais restait avec ses parents. En prenant de l’âge, ceux-ci avaient envie d’une maison à la campagne, pas trop loin. Ils finirent par trouver une ancienne ferme. Ils s’y rendaient en été et, année après année, l’aménagèrent. Un jardin, indépendant de la maison, réveillait en ces anciens travailleurs agricoles leurs gestes de jeunesse.medium_Aillant_1933.jpg

Le deux-pièces a d’abord laissé s’envoler Roger, qui s’est marié puis est parti à la guerre. C’est alors que la maison a recueilli sa femme et leur garçon – il était prisonnier en Allemagne. Les deux filles, Yvonne et Andrée, occupaient l’appartement. Entre-temps, Andrée elle aussi travaille. Elles aident leurs parents de leur mieux. Pendant l’Occupation, elles vont à bicyclette dans cette campagne éloignée de plus de cent kilomètres. Firmin et Justine élevaient un ou deux lapins et des poules, cela valait le voyage.

Après la guerre, le deux-pièces abrite les deux sœurs. Puis Andrée se marie et vit un temps dans une chambre meublée jusqu’à la naissance du premier enfant. L’enfant né, ils y vivent – comme bien souvent avant 1955 – à quatre : un couple avec enfant et la sœur célibataire. À la naissance du second enfant, le couple enfin trouve une petite maison mitoyenne à louer en banlieue, à Juvisy-sur-Orge. Et la maison de la campagne, où Firmin et Justine ont élu retraite, accueille la famille aux vacances. Ô combien les fruits et légumes du jardin avaient-ils de goût. Le lait venait de la ferme d’en face, comme les lapins ou les œufs.

medium_Aillant_1950.jpgMais Firmin ne verra pas 1955. Justine, restée seule dans cette maison, supporte mal son départ brutal et revient vivre avec Yvonne, dans le deux-pièces du Kremlin. Justine décède en 1968. Le deux-pièces sera abandonné en 1971, à la retraite d’Yvonne. La maison sera alors ouverte de début mai à fin octobre. Au creux de l’hiver, Yvonne habite chez sa sœur, dans un appartement loué cette fois plus près de Paris. Cette génération aménage la grange, fait installer une salle de bain et des toilettes. À partir de Pâques et jusqu’à la fin de la belle saison, on vient y passer de nombreuses fins de semaines.

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Cette maison a vu aujourd’hui arriver le gaz de ville.

16:25 Publié dans Humeur | Lien permanent | Commentaires (0)

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