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mardi, 24 octobre 2006

L’éditeur pourrissant

J’ai découvert les éditions Actes Sud en 1979, dans une petite librairie d’Apt (Vaucluse). La maison avait été fondée l’année précédente par Hubert Nyssen, écrivain belge amoureux du soleil de Provence. J’ai suivi le travail de cette maison jusqu’en 1986 environ. Depuis, petit à petit puis plus rapidement, je m’en suis détaché jusqu’à considérer qu’elle est devenue exemplaire : elle est, pour ce qui est de ses choix, tout ce que je n’aime pas. Cette opinion ne doit rien au fait d’avoir été refusé par elle à plusieurs reprises (j’ai été refusé par la terre entière, et je ne la déteste pas.) J’avais rencontré Bertrand Py, numéro deux de la maison, il y a vingt ans, dans les bureaux parisiens. Py est devenu ensuite le numéro un. J’avais aussi bavardé avec Nyssen au salon du Livre, en 1984, je crois. Martine s’était adressée à lui quelques années plus tard, au cours d’une rencontre dans une bibliothèque parisienne. Il lui avait parlé sans même la regarder dans les yeux.

J’avais lu en leur temps les trois tomes de L’Éditeur et son double, le journal que Nyssen publiait dans sa propre firme. J’y avais trouvé confirmation de mon désintérêt pour ce qu’il publiait, mais les livres de et sur l’édition sont un de mes dadas. Depuis plusieurs années, Nyssen ne fait plus paraître ses carnets. Mais, depuis novembre 2004, il les tient sur la Toile. Voilà un exemple intéressant de la différence d’intérêt qu’implique la différence de support. Ce qu’il nous raconte sur internet m’ennuie à mourir. Or, c’est la même chose que ce qu’il faisait paraître sous forme d’imprimé. Le même mélange de snobisme gentiment socialiste, d’érudition de salon, d’importance accordée à des livres que je ne veux même pas feuilleter, de grivoiserie légère, de vieillissement salace présenté (et sans doute vécu) comme une gourmandise du regard, de rêves d’homme à femmes qui sait tenir une plume mais n’a rien à raconter…

Pour être tout à fait franc, j’avais pris quelque plaisir à la lecture d’Éléonore à Dresde, mais Les Rois borgnes m’était tombé des mains. L’Italienne au rucher m’avait paru le comble de l’inutilité. Je n’avais pas détesté, en revanche, Du texte au livre, les avatars du sens ni Le Livre franc.

Sur internet, à présent, se trouve, avec fautes de frappe et, curieusement, l’ignorance des guillemets français,  le mémento d’un éditeur qui lira, écrira et publiera des romans jusqu’à son dernier souffle, ajoutant les romans aux romans avant de lire quelques romans encore ; d’un éditeur qui, entre autres écrivains sans raison d’être, a imposé au monde entier, comme une découverte de première importance, un produit fabriqué : Nina Berberova, à elle seule le résumé d’Actes Sud.

15:00 Publié dans Édition | Lien permanent | Commentaires (26)

Commentaires

Comment ?! Comment !? Vous osez médire du bienfaiteur de l'ULg ? Lui qui nous a fait la faveur de nous confier ses archives complètes et a même consenti à devenir docteur honoris causa de notre humble institution !
http://www.presse.ulg.ac.be/evenements/Nyssen/

Écrit par : lamkyre | mardi, 24 octobre 2006

Oui, j'ose. Je savais qu'il avait fait ce legs et qu'il était docteur honoris causa. Il est aussi docteur en France, je crois bien. C'est un bon exemple de la réputation de ce monsieur qui n'est sûrement pas usurpée, ce n'est pas ce que je veux dire, mais très grandement exagérée.

Écrit par : Jacques Layani | mardi, 24 octobre 2006

Il a pourtant fait beaucoup pour la littérature scandinave qui sans lui ne reposerait que sur les épaules de Régis Boyer, et puis c'est quand même l'éditeur de Paul Auster, ce qui n'est pas rien.

Écrit par : Dominique | mardi, 24 octobre 2006

J'ai connu Régis Boyer quand je m'occupais des langues dites rares au baccalauréat, de 1981 à 1983. Il était à l'Inalco. C'était un type délicieux, s'il m'en souvient. Cela dit, si je ne me trompe, bon nombre de livres traduits du norvégien et parus chez Actes Sud sont traduits... par Boyer.

On trouvera toujours, bien sûr, quelque chose à sauver chez chacun. Mais enfin...

Écrit par : Jacques Layani | mardi, 24 octobre 2006

Et Hella Haase, Cees Noteboom, Hugo Claus, la littérature néerlandaise ? C'est mineur ?

Écrit par : Dominique | mardi, 24 octobre 2006

J'ai lu un livre de Cees Noteboom chez Actes Sud, je n'en ai pas été marqué à vie. Hugo Claus, je l'ai lu ailleurs que chez Actes Sud.

Nyssen a, s'il faut étudier le catalogue à la loupe, délibérément sacrifié les auteurs français.

Oui, je sais, Benoît (je prends les devants), il y a Nancy Huston. Et là aussi, c'est très malsain. On a vraiment l'impression que Nancy Huston, comme Alice Ferney, c'est "l'écurie féminine" (si j'ose écrire) de Nyssen. Il est littéralement amoureux d'elles deux, et d'une ou deux autres. Cela ne suffit pas, quand même. D'ailleurs, Alice Ferney, à part son premier livre chez Actes Sud, L'Elégance des veuves, c'est nul. Mais Nyssen les aime, alors... J'en veux pour preuve ses carnets, où il parle avec paternalisme et gourmandise à la fois, de "notre Nancy".

Écrit par : Jacques Layani | mardi, 24 octobre 2006

Et Zoé Valdès, aussi.

Écrit par : desavy | mardi, 24 octobre 2006

Qu'un éditeur aime ses auteurs, femmes ou hommes d'ailleurs, c'est bien le moins. Nous nous sommes déjà opposés sur Actes Sud par le passé. Je ne comprends pas qu'on puisse jeter un catalogue pareil pour une ou des détestations envers Nyssen lui-même ou Berberova.

Je vous avais déjà dit ne pas comprendre la raison d'une haine aussi intense de Berberova, que j'ai lu parfois avec plaisir (L'accompagnatrice, Le mal noir) parfois avec ennui (C'est moi qui souligne) mais enfin, Je ne comprends pas ce qu'il y a là-dedans qui déclanche une telle animosité. Et je ne parle pas de marketing, je parle du contenu, des textes.

J'ai parcouru certains carnets de Nyssen, plus par curiosité des auteurs que j'aime que par intérêt pour l'homme.

MAIS MAIS MAIS: oui, il y a Huston. Pour son Tombeau de Romain Gary, mais aussi pour une demi-douzaine de romans excellents, dont le plus récent, Lignes de faille, une splendeur - et pour ses essais, Professeurs de désespoir, Ämes et corps et surtout Nord perdu, un texte sur l'exil, très important pour moi.

Et surtout, il y a Goran Tunström, génial écrivain suédois, qui n'a rien à envier même à mon cher Romain, avec au moins trois chefs-d'oeuvre (je me modère): Le voleur de bible, L'Oratorio de Noêl et La parole du désert.

Et Torgny Lindgren ? Extraordinaire "La lumière". Et Selma Lagerlof ?? Et Wassmö (Le livre de Dina) ? Je connais mal Noteboom mais j'avais aimé son "Histoire suivante".

Et Dominique a raison, il y a Auster, mais, et Don Delillo, Russel Banks et Siri Hudsvedt ? Et beaucoup d'écrivains québécois, Jacques Poulin, Jean Barbe, et l'inégal mais parfois excellent Michel Tremblay (Douze coups de théâtre).

Et que faites-vous de Pierrette Fleutiaux ? Je n'aime pas tous ses livres, mais son avant-dernier, "Des phrases courtes ma chérie" était excellentissime.

Bref, j'ai moi-même eu le déplaisir de rencontrer Françoise Nyssen dans un Salon du livre (alors que Fleutiaux était charmante) et si je me contentais de cette seule rencontre pour juger du catalogue Actes Sud, je serais d'accord pour dire que ça ne vaut pas tripette. Mais on s'en fout des Nyssen, il y a énormément d'excellents auteurs dans cette maison. Jacques, vous devriez jetez un oeil sur les essais érudits d'Alberto Manguel sur la lecture.

Bien sûr qu'il n'y a pas que des chefs-d'oeuvre (ex.: Alice Ferney et sa Conversation amoureuse, sans intérêt) mais ne serait-ce que pour ces auteurs cités plus haut, Actes Sud figure parmi les éditeurs dont je guette le programme de parution.

Quant à Berberova, si elle a pu lui permettre, oeuvre inégale ou pas, détestée de vous ou pas, de monter sa maison et d'éditer Huston et Tunström, je lui suis éternellement reconaissant. Il ya des rencontres livresques qui valent bien des rencontres physiques et le défunt Goran T. m'accompagnera toujours.

Écrit par : Benoit | mercredi, 25 octobre 2006

Nous ne parlons pas de la même chose.

C’est certainement de ma faute : je me fais mal comprendre.

Mon propos n’était pas de dresser des listes d’auteurs. On peut sauver quelque chose même dans le pire des catalogues. Moi, Des phrases courtes, ma chérie, je trouve ça nul. Vous, vous aimez. Les livres de Manguel me paraissent illisibles. Nous n’aimons pas les mêmes livres, ce n’est pas important, ça peut même fortifier l’amitié. Mais ce n’est pas le problème.

Mon propos est le suivant. En 1978, Nyssen affirme sa volonté de créer une maison différente. Il parle de coups de cœur. Il veut transformer l’esprit de la 4e de couverture, qu’il intitule alors « Le point de vue de l’éditeur » et signe de son nom. Il rejette avec horreur la notion de « collection » qui aboutit à faire d’une maison d’édition un casier à bouteilles aux parutions formatées (on n’employait pas encore ce terme, mais c’est l’esprit.)

Résultat : Actes Sud est une des maisons qui, depuis cette date, a créé le plus de collections, assez souvent éphémères d’ailleurs. La 4e de couverture est depuis longtemps sans nuances et ressemble strictement à celle des autres boîtes. Les coups de cœur deviennent des coups tout court.

D’ailleurs, ces coups de cœur, c’était quoi ? Aux tout-débuts, il nous a fait un fromage avec "Pierre, pour mémoire" : manuscrit reçu par la poste (bien sûr), lu dans la nuit et, au matin, l’éditeur bouleversé appelle personnellement l’auteur et lui annonce sa prochaine publication. Bon, ce conte de fées, ça donne quoi ? Un livret de quelques pages sans intérêt aucun. Quoi d’autre ? "Tuta blu", ce truc d’un ouvrier italien si je me souviens bien ? Bah, bof et rebah…

Au bout du compte, cette maison s’est appliquée, scrupuleusement, à ressembler à toutes les autres, en répétant à l’envi qu’elle était différente. « Il importe que le bruit des tiroirs-caisse ne couvre pas trop le murmure des textes » déclarait Nyssen autrefois, dans une de ses envolées prétentieuses. Résultat : la course aux prix, comme les autres. Et, en 2004, un Goncourt dont on parle encore chez Actes Sud : la saga d’une famille des Pouilles de la fin du XIXe à nos jours ! Je me rappelle avoir gueulé, à l’époque, chez ce calamar d’Assouline, contre ça. En 2004, il n’y avait rien d’autre à dire de plus urgent, de plus évidemment utile au monde, qu’une saga familiale classique ? Consternant ! Résultat, le nom de l’auteur est oublié de tous hormis des représentants d’Actes Sud.

Et Nyssen qui bave devant ses auteurs femmes, berk ! Depuis quelques années, il est confit dans les honneurs (honoris causa, décorations) et finit par imaginer qu’il a la même importance qu’un Seghers, un Pauvert ou un Julliard dans l’histoire éditoriale (et je ne cite pas de noms plus célèbres encore, volontairement.) Monsieur lègue ses archives… Il ne faudrait pas en exagérer l’importance, à mon avis. Pourquoi pas à l’Institut Mémoire de l’édition contemporaine (IMEC) d’ailleurs ? Si ça se trouve, l’IMEC n’en a même pas voulu. Enfin, je n’en sais rien.

Vous avez vu sa galerie de photos, sur son site ? C’est pitoyable. Quant à ses carnets, c’est ce que je disais hier : la gauche faux-caviar, mollement socialiste, rêvant qu’elle est quelque chose d’important entre des lambris dorés. Je sais de quoi je parle : cinq ans au ministère de l’Inculture du temps de Lang, roi de la paillette, et des énarques pourris qu’il avait nommés aux postes de direction, hautains, condescendants, méprisants, au moins autant que des mecs de droite, bref, l’horreur. Et tout ça se congratule, voire s’auto-congratule.

En bref, j’accuse Nyssen de non-existence.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 25 octobre 2006

Je n'ai acheté qu'un P. Fleutiaux : Allons-nous être heureux. Pourtant j'avais envie de lire - pour une fois - un roman. Jamais pu dépasser la page 60. Je crois aussi que l'abord des livres, c'est comme l'abord des hommes, tout dépend des circonstances dans lesquelles se fait la rencontre.

Écrit par : Martine Layani-Le Coz | mercredi, 25 octobre 2006

Précision : ce Fleutiaux-là était chez Gallimard.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 25 octobre 2006

Laurent Gaudé n'a pas été oublié de tous : un extrait de son pensum a été donné lors du dernier brevet des collèges. L'auteur se fait assassiner sur le site de Sauver les lettres car on ne voit aucun intérêt au passage retenu et aucun style. Dans le même genre pompeux et ennuyeux chez Actes-Sud, il faut signaler l'inénarrable Gérard de Cortanze qui poursuit ses sagas familiales.

Cela dit, le catalogue d'Actes-Sud doit faire deux ou trois mille volumes, si ce n'est plus. Or si on regarde le catalogue de grandes maisons comme Gallimard dans les années 50-60 (pour avoir un peu de recul), il y avait aussi une masse de nanars qui n'ont jamais retenu l'attention plus d'une saison. Le reproche que l'on peut faire à Nyssen, c'est d'avoir énormément publié, d'avoir joué la cavalerie pour maintenir son chiffre d'affaire, d'avoir participé plus que d'autres à l'inflation éditoriale un peu comme un Laffont ou un Albin-Michel auparavant, un peu comme Dimitrijevic à l'Âge d'homme, bref de ne pas avoir fait le tri. Mais je maintiens qu'il y a des choses excellentes chez Actes-Sud dans le domaine étranger : un écrivain coréen comme Yi Munyol me semble de premier plan, Paul Nizon n'était pas traduit alors qu'il est Suisse donc tout proche.

Écrit par : Dominique | mercredi, 25 octobre 2006

Nous sommes donc d'accord sur le fond. Nyssen s'est comporté exactement comme les autres, après des déclarations d'intention doucereuses et hypocritement passionnées. Il faut le dire.

Je suis bien content que le Goncourt 2004 ait aussi peu la cote. Ah, il fallait lire les déclarations triomphales d'Actes Sud en 2004 ! C'était à la fois écoeurant et vraiment ridicule.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 25 octobre 2006

Il ne faut pas oublier le tour de force majeur d'Actes Sud, qui a été de conquérir un très vaste public en prenant la pose du petit éditeur indépendant antiparisien, alors que c'était, au courant des années 1990, la maison la plus subventionnée de toutes parts, et qui pratiquait, largement autant que Gallimard ou Grasset, le clientélisme...

Dans les "bons auteurs" d'Actes Sud (car il y en a, et Jacques n'a jamais dit le contraire), j'aimerais saluer l'immense Jamal Mahjoub !

Écrit par : Guillaume | mercredi, 25 octobre 2006

Ah, je vois que mon opinion sur cette maison est tout de même partagée.

Je dois ajouter qu'Actes Sud, comme les autres, se fait tirer l'oreille pour payer ses auteurs (de l'aveu d'un auteur, bien sûr.)

Et encore qu'ils pratiquent le compte d'auteur déguisé. Je l'ai déjà raconté ici, je ne sais plus où. Claudine Sudre, photographe, spécialiste des clichés du XIXe et de leur traitement, veut faire paraître un ouvrage sur son mari le photographe Jean-Pierre Sudre, un grand artiste qui est décédé (sur lui ou de lui, peut-on jamais savoir avec les livres de photographie ?) Actes Sud lui vend son label. Sous la marque Actes Sud a paru un album de photographies de Jean-Pierre Sudre, une rétrospective. Actes Sud n'y a pas mis un centime. Claudine Sudre a été obligée de créer une association et de financer entièrement la publication. Raconté par elle-même à votre serviteur.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 25 octobre 2006

Bon, mais Nyssen a bénéficié de subventions au titre de l'édition théâtrale qui est l'une des plus déficitaires (et néanmoins indispensable pour la création de pièces) et pour la traduction de textes qui ne rentraient pas dans le modèle marchand ou qui étaient des classiques. Si on veut parler de quelqu'un qui a abusé des subventions sans aucune création durant les années 80, il vaut mieux parler de Michel Butel, celui qui a réussi à saborder le peu qu'il restait du grand hebdomadaire que fut les Nouvelles Littéraires (après le premier naufrage du contenu grâce à l'infatigable JFK), et après l'Autre Journal, Butel a encore sévi dans la presse et l'édition, toujours en parasite du ministère de la Culture.

Écrit par : Dominique | mercredi, 25 octobre 2006

L'édition théâtrale ? Actes Sud-Papiers ? Une forteresse la plupart du temps réservée à ceux qui ont déjà un nom.

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 25 octobre 2006

"En 2004, il n’y avait rien d’autre à dire de plus urgent, de plus évidemment utile au monde, qu’une saga familiale classique ? Consternant ! Résultat, le nom de l’auteur est oublié de tous hormis des représentants d’Actes Sud."

Bon bon bon. Non on ne s'entendra jamais là-dessus. La littérature devrait être utile au monde ? On va refaire ce débat là ? Utile pour qui, dans quel but et sur la base de.... ???? Ah non, l'utilité, surtout pas !
Vous devriez lire le nouveau Laurent Gaudé, Eldorado, c'est de la littérature "utile", ça parle enfin de quelque chose d'actuel: les africains qui tentent de passer en Europe. Pauvre Gaudé, quand il fait de la saga familiale, vous lui dîtes que ça ne sert à rien, et quand il fait dans l'actualité, il se le fait reprocher par quasi toute critique, parce que la littérature ce n'est pas "actuel", ce n'est pas un "sujet", c'est du style encore du style toujours du style. Chacun dans sa chapelle.

Et c'est bien sûr, le Gaudé nouveau remporte un beau succès, pas du tout oublié de ses lecteurs le Goncourt 2004. (Et non, je ne suis pas un de ses lecteurs.)

Enfin, le postulat de départ de Jacques disait ceci: "Depuis, petit à petit puis plus rapidement, je m’en suis détaché jusqu’à considérer qu’elle est devenue exemplaire : elle est, pour ce qui est de ses choix, tout ce que je n’aime pas."

Il était donc question de choix littéraire et pas juste du bonhomme Nyssen (et là, je n'ai vraiment rien à redire sur le portrait que vous en tiirez, sauf que franchement, se taper les trois tomes de L'éditeur et son double à ce niveau de détestation, dada ou pas, vous frôlez le masochisme), des 4e de couverture, des prix littéraires , et de l'art contre le commerce.

On peut critiquer tout ce qu'on voudra, mais on ne peut cavalièrement foutre à la poubelle tout ce qui est cité plus haut, la littérature scandinave et tout le reste. Je n'ai probablement lu qu'un faible pourcentage de ce qui est paru là mais vraiment, j'ai l'impression (vu l'autre note sur L'Harmattan) qu'il n'est absolument pas question ici des livres et de ce qu'il y a dedans (et vu la diversité des auteurs publiés, ne pas aimer les écrivains Actes Sud ne veut strictement rien dire), ce qui, de mon point de vue de lecteur et de libraire, est ce qui compte avant tout. Je dirais même la seule chose qui compte. Les éditeurs passent, les oeuvres restent...
Enfin, les bonnes.

Écrit par : Benoit | mercredi, 25 octobre 2006

Nous ne parlons pas de la même chose, décidément.

Je peux me taper trois tomes de journal, justement pour savoir de quoi je parle et pourquoi je n'aime pas. Ce n'est pas du masochisme, c'est du sérieux.

"la littérature ce n'est pas "actuel", ce n'est pas un "sujet", c'est du style encore du style toujours du style. Chacun dans sa chapelle." Ah, mais ce ne sont surtout pas des chapelles différentes ! En quoi est-ce incompatible ? On peut traiter un sujet actuel et utile avec du style. Eh oui. Ce sont ceux qui opposent qui se trompent, comme se trompent tous ceux qui ont une vision binaire du monde.

Je persiste et signe : on ne peut pas, en 2006, continuer à produire des romans sans savoir à quoi ils servent. Comprendre : en quoi ils peuvent aider l'homme d'aujourd'hui. Pas seulement à rêver, à se détendre (mot horrible), à avoir des loisirs (mot infect), à se distraire (mot abject) -- mais à vivre, c'est-à-dire à penser et à se conduire en homme libre, en souffrant le moins possible de sa condition.

Je sais bien, Benoît, que, tout au fond, nous pensons la même chose. Tout ça, c'est "l'affaire homme", finalement.

(A propos de l'autre note, celle sur l'Harmattan, il y a du nouveau. Lisez le commentaire que j'ai ajouté. J'ai bien fait de tenir bon.)

Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 25 octobre 2006

Il me semble l’avoir déjà dit ici même dans le passé, mais il est bon de le rappeler.
J’ai vu un jour Hubert Nyssen affirmer effrontément, dans une émission de télévision, qu’il répondait toujours personnellement aux auteurs qui lui avaient envoyé un manuscrit. Sur le plateau à ses côtés il présentait d’ailleurs une jeunette, par ailleurs bien mignonne, ce qui lui permettait de faire d’une pierre deux coups : d’une part faire de la publicité pour un auteur (enfin, une auteure) qu’il lançait et d’autre part expliquer avec quelle attention il avait suivi les premiers pas de la demoiselle (par ailleurs vraiment très mignonne comme il a déjà été dit). Ainsi, s’il avait refusé ses deux premiers manuscrits, il lui avait prodigué moult conseils avant finalement d’accepter le troisième, qu’ils avaient relu et peaufiné ensemble (au point qu’on ne savait plus trop de qui le livre était). Bref, un éditeur paternaliste et amical comme on n’en fait plus.

Acte Sud fut la seule maison d’édition à ne pas me donner de réponse, du temps où naïvement j’envoyais encore des manuscrits aux maisons d’édition. Les autres ont toujours répondu, dans un délai qui varie de deux mois à deux ans, une charmante lettre type de refus.

Écrit par : Feuilly | jeudi, 26 octobre 2006

Et voilà. Ce n'est pas moi qui le dis. Il y a fort loin des déclarations d'intention à la pratique quotidienne.

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 26 octobre 2006

Pour tempérer ce que je viens de dire, j'ajouterai qu'Actes Sud était un des partenaires de la collection Babel (avec Labor en Belgique) dans laquelle on a tout de même des grands classiques (Dostoïevski, Simenon, Tchékov, etc.) ainsi que des auteurs moins connus comme Madeleine Bourdouxhe. Maislà je ne t'apprends rien.

Il es tvrai que Babel, à une certaine époque du moins, était financée par la Communauté française de Belgique (institution officielle décentralisée), ce qui permettait de vendre chaque exemplaire à un prix modique. Mais c'est vrai que de telles aides sont initialement prévues pour aider les éditeurs à lancer de jeunes auteurs et non pour rééditer sans risques des classiques.

Écrit par : Feuilly | jeudi, 26 octobre 2006

Eh eh... Tu m'as évité de le dire, et répondu toi-même.

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 26 octobre 2006

Actes-Sud Papiers ? Laissez-moi rire !!!

La collection ne publie que les pièces qui sont montées, afin de ne rien avoir à financer. Je connais bien la traductrice d'une pièce récemment publiée dans cette collection. Elle n'a pas touché un centime, les théâtreux ont financé une partie de l'édition... et Actes Sud a reçu une subvention !

Si ça n'enfonce pas la mairie de Paris de la grande époque, ça...

Écrit par : Guillaume | dimanche, 29 octobre 2006

Feuilly > il vous manquait d'être assez mignonne :-)

Écrit par : Guillaume | dimanche, 29 octobre 2006

Et voilà les moeurs d'Actes Sud... Là encore, ce n'est pas moi qui le dis.

Écrit par : Jacques Layani | dimanche, 29 octobre 2006

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