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samedi, 27 septembre 2008

De mon journal de 2005

19 août

L’été se casse lentement. Il a passé une chemise de vent et s’est curieusement coiffé. Il lui arrive de pleurer pour ce qu’il pressent de son avenir. Les murs de son appartement de collines seront à repeindre l’an prochain. Il faudra aussi, au printemps, changer la moquette. Son souffle est moins ample, il respire à plus petites bouffées, s’économise. Il devient raisonnable. De pamphlétaire, il vire au feuilletoniste.

Sur le plateau du tourne-disques, un enregistrement de poèmes libertins du XVIe siècle. De magnifiques blasons. Ce qu’il ne fallait pas faire pour amener la belle au déduit, tout de même. C’est charmant – et quel talent ! Dans les verres, un bordeaux très honnête, sinon grand. Le pain s’ouvre sous le couteau, le fromage sent le fromage. Fichu pays de France…

Dans les sous-bois déjà, des morceaux d’or chutent gracieusement et forment au sol la litière des dieux. La fougère, cette barbe de trois jours des coteaux mal rasés, brunit rapidement. Il semble que les routes tortillonnent vers l’oubli. Sur le bas-côté, les gravillons et l’herbe folle ont scellé leurs destins.

23 août

Rien à faire, l’été s’obstine à s’éteindre. Il conserve une peau douce et quelques traits de mascara vert, mais une sueur froide a pris son front et le ceint d’abandon. Ses lauriers ternissent. Il semble qu’une main gigantesque l’attire sinistrement vers un gouffre sombre et qu’il n’ait guère le goût de résister. Le vent donne la parole au feuillage des chênes que leur seul nom de « vert » paraît garantir du naufrage. Leurs glands tombés s’embrument de vieillesse. Dans les branches, un bruit régulier signale la présence d’une bête invisible. Ce n’est pas un oiseau, peut-être un écureuil, cet enfant de rousseur aux yeux d’outre-monde. Sous le pas du promeneur, des feuilles mortes déjà craquent sensiblement, comme la mémoire d’une force enchaînée, éteinte. Les mûres ont noirci, mais pas toutes. Chaque journée en fera rougir puis foncer de nouvelles. Parfois, d’immenses ronces recourbées en protègent les grappes. Certains ronciers sont stériles. À quoi peut bien servir un roncier stérile ? Dans les pierriers, les ronces s’agrippent au temps qui passe.

21:32 Publié dans Humeur | Lien permanent | Commentaires (0)

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